Ma soif est un miroir obscur

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Ma soif est un miroir obscur et clos
où se mire, librement, ton eau…
Parce que tu ne fuis pas le vol vorace et la glace,
nous sommes deux nuits à contredire la nuit.

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Vaincues, non. Dépossédées

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Comme deux étoiles jumelles

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Comme deux étoiles jumelles
qui se poursuivent en défiant la nuit,
Comme toute peau abandonne sa vieille mue
et comme se fondent les frontières,
rapprochons-nous.
Ne joue pas à me faire peur
en me toisant du seuil,
ne revêt pas ton costume d’ogre,
de pillard, d’épervier royal
ou de chauve-souris dans mon sein.
Laisse, devant la porte, les vieilles armes
qui te faisaient guerrier
et maintenant te voient vaincu,
laisse les tables où la loi est figée.
Abandonne ton nom
jusqu’à ce que je trouve le mien.
Ne dis pas la moindre parole
car je n’ai pas de langue.
Ne te cache pas dans l’armoire
comme après un obscur délit.
Ne soupèse pas dans la balance
mon amour à double tranchant.

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Tu t’en vas vers l’horizon de ton plaisir

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Tu t’en vas vers l’horizon de ton plaisir
comme un soleil qui s’enfonce, incandescent,
dans l’utérus nostalgique des ténèbres.
Et je m’enfonce en toi, glisse avec toi
au fond de l’abîme sans nom ni miroir.
Et tu reviens, et je reviens, en toi et en moi,
aimantées au désir. Et tourne le monde
dans une lumière tendue qui fait naître
mon plaisir, cri et sang de l’aube.

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Trouble est mon amour…

Tèrbolament t’estimo. Tot el pòsit
s’ha remogut. La copa com un mar
tempestejat m’aboca, a contrasang,
restes de vells naufragis, fustes, urc
de suïcidis oblidats, quitrà
enquistat dins l’onada, algues, mort.
No sé trencar-la. Ni, assedegada,
buidar-ne tot l’embat en un sol glop
sense esquixar-te ni ferir-te, sense
arrossegar-te a l’escullera amb mi.

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Trouble est mon amour pour toi.
Tout le dépôt a été brassé.
La coupe comme une mer tempétueuse
me déverse à contre-sang
les vestiges d’anciennes épaves, bois, vanité
des suicidés oubliés, goudrons
pris au piège dans la vague, les algues, la mort.
Et je ne sais pas comment la briser.
Ni, assoiffée, vider toute l’écume d’un trait
sans t’éclabousser ni te blesser,
sans t’entrainer avec moi jusqu’aux récifs.

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Quand au milieu du dégel

Quan, enmig del desglaç,
el riu remunta
cap a la deu,
i el seu curs foravit es peix
com un mirall
del teu rostre, i me’l torna,
enllà de tu,
convertit en tenebra
i esglai opac…
Que em neixin ulls de cega,
uns ulls vivents
al cap dels dits
per llegir-te i no perdre’m
en el vell simulacre
sense contorns
que com un gorg devora
la meva nit
.

————

Quand, au milieu du dégel,
la rivière remonte
vers sa source,
et que son cours dévié
renvoie ton visage comme un miroir
et me le rend, au-delà de toi,
transformé en obscurité
et en peur opaque…
Que des yeux d’aveugle me naissent,
des yeux vivants
au bout des doigts
pour te lire et ne pas me perdre
dans  le vieux simulacre
sans contours
qui comme un gouffre
dévore ma nuit.



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La mort t’a fait échec et mat

La mort t’ha fet escac i mat sense retop.
I de retop a mi, des del fons del mirall
que se m’encara, clos: no hi val amagatall.
Em sé arrapats al coll els tentacles del pop.

Sento l’udol del ca i el plany del llop.
El galop desbocat de l’hora i el cavall
del record que ens calciga, ja ni cassigall
del que fórem, i el glaç que ens colga cóp a cóp.

No sé sortir d’aquest carrer tallat
a sang pel mur on les ombres m’endolen
i on estrafaig només ganyotes de penjat.

I on et veig, cec als dies que s’escolen
sense donar-nos treva, en el tauler marcat
de la Mort, que ens ha fet escac i mat.

—————-

La mort t’a fait échec et mat, irrémédiablement,
Et me revient par ricochet, du fond du miroir
M’y maintenant captive : je ne vais pas me le cacher.
Je sens les tentacules de la pieuvre s’accrocher à mon cou !

J’entends le hurlement du chien et la plainte du loup.
Le galop effréné de l’heure et le cheval du souvenir
qui piétine déjà les haillons de ce que nous étions,
Et la glace qui nous recouvre copeau après copeau.

Je ne sais comment sortir de cette rue entaillée jusqu’au sang
Par le mur dont les ombres me blessent
et où je ne fais qu’imiter les grimaces du pendu.

Et où je te vois, aveugle aux jours qui s’écoulent
sans nous laisser de répit, sur le plateau marqueté de la Mort,
qui nous a fait échec et mat.







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Cette part de moi…

Cada dona adora un feixista…
SYLVIA PLATH

Aquella part de mi que adorava un feixista
– o l’adora, qui ho sap!
jeu amb tu, jau amb tu.

No l’espanta la tomba. Cridada des de sempre
al domini més fosc,
mor amb tu, i viu de tu.

Ofrena tremolosa, no sap sinó seguir-te
i arrapar-se al teu mal
com al port més segur.

Medusa desossada, allò que de mi resta
malda per completar-se
sense tu, lluny de tu.

El bisturí vacil.la. Qui em viu a l’altra banda?
I com podré pensar-te
com si jo no fos tu?

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Chaque femme adore un fasciste…
SYLVIA PLATH

Cette part de moi qui adorait un fasciste
– ou l’adore, qui sait !
gît avec toi, gît avec toi.

Elle ne craint pas la tombe. Vouée depuis toujours
à la domination la plus sombre,
elle vit et meurt par toi.

Offrande tremblante, elle ne sait que te suivre,
s’accrocher à ton mal
comme au port le plus sûr.

Méduse désossée, ce qu’il reste de moi
se débat pour se réaliser
sans toi, loin de toi.

Le bistouri hésite. Une part de moi vit-elle dans l’au-delà ?
Et comment pourrais-je t’envisager
comme si je n’étais pas toi ?

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Père épervier qui me scrute des cieux

Pare-esparver que em sotges des del cel
i em cites en el regne del teu nom,
em petrifica la teva voluntat
que es fa en la terra com es fa en el cel.
La meva sang de cada dia
s’escola enllà de tu en el dia d’avui
però no sé desfer-me de les velles culpes
i m’emmirallo en els més cecs deutors.
I em deixo caure en la temptació
de perseguir-te en l’ombra del meu mal.

———

Père-épervier qui me scrute des cieux,
et qui m’appelle au règne de ton nom,
je suis pétrifiée par ta volonté
qui se fait sur la terre comme au ciel.

Mon sang quotidien
s’écoule loin de toi aujourd’hui
mais je ne sais me défaire des vieilles fautes
et me reconnais dans tes plus aveugles débiteurs.

Et je me laisse succomber à la tentation
de te poursuivre dans l’ombre de mon mal.

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Fin’amour

Fina amor, joc extrem, or subtil
que em cremes sense tornar-me cendra.
Dins l’alquimia bàrbara i tendra
del teu cos, on el foc passa a fil
de flama l’ombra i el seu seguici,
pren-me, desfes-me, refes-me, muda
en cant la fosca mercè, la muda
sang d’exili en llavor de solstici.




Fin’amour, jeu extrême, ou subtil
qui me brûle sans me réduire en cendres.
Dans l’alchimie barbare et tendre
de ton corps où le feu passe l’ombre et sa clique
au fil des flammes,
prends-moi, défait-moi, refait-moi, muette
en chantant la sombre miséricorde,
le sang muet de l’exil
dans la semence du solstice



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Ombre rapace


Si no fos el deler de l’esparver
i l’ull veloç del falcó que em percaça,
si no fos l’ombra de la meva passa
que m’estalona amb pas molt més lleuger.

Si no fos el falcó, i el falconer,
l’aigua, la set, quallades a la tassa,
si no fos la congesta que corglaça
l’alè roent del cor i del corser.

Si no fos l’esparver i el seu deler
que esparveren l’ullastre i l’olivarda,
si no fos el redall de la basarda
i el bec salaç que signa el meu terrer

et fitaria, amor, i el teu esquer
faria tendra l’hora més isarda.






S’il n’y avait pas eu l’avidité de l’épervier
et l’œil vif du faucon qui me pourchassait,
S’il n’y avait pas eu l’ombre de mon passage
qui me talonnait d’un pas plus que léger.

S’il n’y avait pas eu le faucon et le fauconnier,
l’eau, la soif, caillées dans la tasse,
s’il n’y avait pas eu la congère qui figea
le souffle brulant du cœur et l’haleine du coursier.

S’il n’y avait pas eu l’épervier et son avidité
qui séparèrent l’inule de l’olivier sauvage,
s’il n’y avait pas eu le regain de la peur
et le gouffre salé qui révélait ma terreur

Je te regarderais, mon amour, et ton attrait
aurait rendu douce l’heure la plus abrupte.


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Sous ce vent s’attisent….

Sota aquest vent s’aviven
calius d’antigues xeres mal colgades…
Estrany cal.lidoscopi
on el que és vell es torna neu intacta
– oferta a tu, perquè hi deixis petjades
i en sollis la puresa massa eixorca –
i on el que és nou perd llei d’estrangeria…!

En tu estimo tot el meu passat
congriat en un sol nom ritual:
els ravals foscos del desig, el mal,
la mar assolellada i el bressol.
Cada tombant del teu cos m’alimenta
d’altres paisatges que l’oblit no fon:
el foc encén de nou cada campana
i es clou l’enyor, en retrobar-los vius,
fets carn en tu, i tu els dónes sentit.

No esborraria cap revolt, cap culpa,
cap rastre de coltell, ni l’ombra ni l’estrall,
ni el desert ni la sang sembrada arran de duna,
morta, ni els verds oasis delmats, ni cap miratge,
ni el crit fosforescent dels ossos que els xacals
han rostat i abandonen cansats…:

Prenc el camí que m’ha portat a tu.




Sous ce vent s’attisent
les braises d’anciennes flambées mal éteintes…
Étrange calor.eidoscope
dans lequel ce qui est vieux redevient neige intacte
– Ton offrande pour y avoir laissé tes empreintes
Et que tu trouves cette pureté trop stérile –
et où ce qui est nouveau perd la loi de l’étrangeté.

En toi j’aime tout mon passé
réunis en un seul nom rituel :
les sombres faubourgs du désir, le mal,
la mer ensoleillée et le berceau.
Chaque goutte de ton corps me nourrit
d’autres paysages que l’oubli n’a pas fondus :
le feu rallume chaque cloche             
et le désir se referme, en les retrouvant vivantes,
elles se font chair en toi, à mesure que tu leur donnes un sens.

Je n’effacerais aucun virage, aucune culpabilité,
aucune trace de couteau, ni l’ombre ni les ravages,
ni le désert ni le sang semé à fleur de dune,
morte, ni les vertes oasis décimées, ni aucun mirage,
ni le cri phosphorescent des ossements que les chacals
ont rongés et finalement abandonnés de guerre lasse… :

Je prends le chemin qui m’a conduit à toi.







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Le ciel s’est peint le visage…

El cel es pinta la cara de turquesa
en va per fer-me companyia
i inventa màscares de vidre,
de setí, randa o núvol
per fer-me creure que t’amagues
rere cada comparsa.
Prou sé que Carnestoltes
sols em porta la mort
que en l’oblit s’emmascara
o es vesteix amb les gales
pomposes que cosia
de sotamà el record





En vain le ciel s’est peint le visage en turquoise
pour me tenir compagnie
et invente des masques de verre,
de satin, de dentelle ou de nuages
pour me faire croire que tu te caches
derrière chaque comparse.
Je ne sais que trop que le carnaval
ne m’apporte que la mort
qui est cachée dans l’oubli
ou qui revêt des habits de gala
pour coudre la mémoire
en sous main.






            
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La mort t’a fait les pieds de glace…

La mort t’ha fet els peus de glaç,
gegant estrany que per damunt les aigües
em tragines, nadó arrapat al teu pit,
fins als confins de la teva paraula.

L’amor no sap el teu nom en la mort
i s’esgarria en l’ombra dels teus passos;
camí d’enlloc, de tornada d’enlloc,
jo, sense llengua, t’encalço amb els mots.

Et nega el nom aquest nom que em nodreix
i neix de mi. Que t’abraça rient
com un incendi, calcina el teu ull
i, cegament, es disposa al convit.



La mort t’a fait les pieds de glace,
étrange géant qui au-dessus des eaux
me transporte, nourrisson accroché à ta poitrine,
jusqu’au bout de ta parole.

L’amour ne connaît pas ton nom dans la mort
et il s’égare dans l’ombre de tes pas ;
cheminant d’ailleurs, de retour de nulle part,
moi, sans langue, je te poursuis avec les mot.

Il te refuse le nom, ce nom qui me nourrit
et nait de moi. Qui t’embrasse en riant
comme un incendie, calcine ton oeil
et aveuglément, se prépare au festin.




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Sobre une pintura….

Sobre una pintura de Frida Kalho.

Tinc dins del cap un cap d’home,
– matriu sense camí!
Donar-lo a llum  em mata,
servar-lo em fa morir.

No és cap home, és un nen,
clavat com una dent.
Si no neix em devora per dins,
si neix m’esbotza el crani i el cervell.

Enmig del seu front un ull
em vigila glaçat
perquè cap culpa no m’exiliï
d’aquest vell paradís.


Sur un tableau de Frida Kalho.

J’ai une tête d’homme dans ma tête,
– matrice sans chemin !
Lui donner vie me tue,
le servir me fait mourir.

Ce n’est pas une tête homme, c’est un enfant,
Enraciné comme une dent.
S’il n’est pas né, il me dévore de l’intérieur,
s’il naît, il m’éclate le crâne et le cerveau.

Au milieu de son front un oeil
qui glacial me surveille
afin qu’aucune faute ne me chasse
de cet ancien paradis.







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Dans l’espace sombre…




En el clos fosc d’unes ales gegants
que es pleguen sobre meu i em donen cobri,
l’ombra em té tota. No em valen els mots.
La teva cendra em colga en vell caliu.
La teva llengua em clava en el silenci.





Dans l’espace sombre de quelques ailes géantes
qui se replient sur moi et me couvrent,
l’ombre me possède tout entière. Les mots sont inutiles.
Ta cendre m’éteint comme une vieille braise.
Ta langue me cloue dans le silence.







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Chansonnette douce

CANÇONETA LLEU

A Pepa P.

Desig, abella
solitària,
de què fas mel
si cap flor no
se’t bada?
Fes mel i no
facis tan sols
cera amarga
que em torni sorda
al teu reclam
de sirena.




CHANSONNETTE DOUCE


A Pepa P.

Désir, abeille
solitaire,
Avec quoi fais-tu ton miel
s’il n’y a de fleur
qui s’ouvre ?

Fais du miel et pas
seulement cette
cire amère
qui me rends sourde
à ton appel
de sirène.


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N’étrangle pas la petite…


No escanyis la petita que viu, rebel, en mi
que m’incita al candor, a encendre la mirada,
a estrenar boscos on els llops fan nit
i a creure en el poder de les paraules:
insecte estrany que fins i tot clavat
a la seva minúscula ranera
impenitent arbora
el repte del seu vol.



N’étrangle pas la petite qui vit, rebelle, en moi
qui m’incite à la candeur, à éclairer mon regard,
à explorer les forêts où les loups passent la nuit
et à croire au pouvoir des mots :
insecte étrange qui a même cloué
et arboré à sa minuscule rainure
le défi de son vol.




            
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Maternité

MATERNITAT

A l’H

Des del principi no ha estat moneda fàcil
el teu riure. Quin pop
te n’ofegà l’esclat en el bressol?
Les guerres, ja ho sé prou, no són alegres.
I potser no he sabut, en terra de ningú,
plantar jardins oberts per als teus ulls…
Ni treva, ni quarters,
ni mapes coneguts, ni l’enemic amb rostre…
I tu menges, dissolta
en el meu pa, la guerra,
liquada en els meus ossos
i fosa dins la sang
que s’esgleva en amor
difícil cap a tu.




MATERNITÉ

A l’H

Dés le début, ton rire
n’a pas été une monnaie facile. Quelle pieuvre
en a étouffé l’éclat dans le berceau ?
Les guerres, je ne le sais que trop, ne sont pas joyeuses.
Et je n’ai peut-être pas su, dans cette terre inconnue,
planter des jardins ouverts pour tes yeux…
Ni trêve, ni quartiers,
pas de cartes connues, pas d’ennemi avec un visage…
Et tu manges, dissoute
dans mon pain, la guerre,
condensée dans mes os
et fondue dans le sang
qui glisse vers toi
dans le difficile amour.



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Parfois la glace…

De vegades el glaç crema la sang
i inutilitza els membres. Renegrits,
pengen com una pelleringa inútil.
– Com el foc més intens: “els gels són calds”,
diu el poeta* -. Sols resta tallar-los
i aprendre a caminar sense la nosa,
aprendre a viure sense el tros de vida
que abans ens completava, imprescindible.
Sovint, però, el buit que se’ns congria
al capdevall de nosaltres, allà
on el tallant polia la feina de l’hivern
és un cor dolorós que s’enderia
a bategar, i ens va glaçant la sang.

(*Josep Vicenç Foix i Mas, « Entre negrors veig mil camins oberts »)


Parfois la glace brûle le sang
et paralyse les membres.
Calcinés, ils pendent comme des lambeaux inutiles.
– Comme le feu le plus intense : « les glaces sont chaudes »,
dit le poète* -. Il ne reste plus qu’à les tailler
et apprendre à marcher sans entrave,
apprendre à vivre sans ce bout de vie
qui auparavant indispensable, nous complétait.
Cependant, le vide souvent nous remplit
Au plus profond de nous, là
où le tranchoir a poli le travail de l’hiver,
se trouve un coeur douloureux qui s’entête
à battre, et nous glace le sang.

(*Josep Vicenç Foix i Mas, « Entre negrors veig mil camins oberts »)



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A propos du traducteur

Je suis issu d’une famille catalane originaire de Lleida et de Cerdanya. Les hasards de la vie ont fait que je vis depuis longtemps loin de mes montagnes pyrénéennes. La lecture et la traduction d’auteurs catalans sont donc les ponts privilégiés qui me relient depuis l’adolescence à ma culture et à ma langue.

Mais si on parlait le catalan à la maison en même temps que le français ou l’occitan, je n’ai jamais étudié suffisamment la langue pour m’en prétendre traducteur. Et encore moins quand il s’agit de poésie.

Par contre, depuis un beau jour de 1978 où une amie catalane (Moltes gracies filla de la muntanya !) m’offrit un recueil de poésie intitulé Cau de LLunes, l’œuvre de Maria-Mercè Marçal m’a toujours accompagné dans les différentes étapes et pérégrinations de ma vie. J’ai lu et relu sans cesse ses poèmes et toujours griffonné sur des carnets des bouts de traductions souvent approximatives.

Je me suis donc jeté comme un mort de faim sur les traductions françaises existantes afin de comparer avec mes notes ou ma compréhension incomplète de passages sibyllins. Grâces soient donc rendues à Anna Serra, Annie Bats ou Michel Bourret Guasteví pour le bonheur qu’ils m’ont apporté par leurs traductions.

Leur exemple m’a inspiré quand j’ai décidé, malgré mon catalan de cuisine, de m’attaquer à la traduction de Desglaç dans sa totalité. J’ai longtemps hésité entre ce recueil et Rao del Cos mais le second résonne toujours tellement douloureusement en moi que je n’étais pas sûr d’avoir le courage d’aller au bout de la traduction.

Après une année et de nombreuses soirées studieuses, j’ai pu achever la traduction intégrale des 83 poèmes et des citations. Alors bien sûr, je n’ai pas la prétention de croire que ma traduction est fidèle à la finesse poétique de la langue de Maria-Mercè Marçal mais j’ai fait de mon mieux et j’espère que leur lecture contribuera à la faire découvrir auprès des amis français qui me font le plaisir de suivre mes différents sites ou blogs.

Florent Costa

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    Daddy

    Feixuc com el marbre, un sac ple de Déu.
    SYLVIA PLATH


    La mort t’ha fet escac i mat sense retop.
    I de retop a mi, des del fons del mirall
    que se m’encara, clos: no hi val amagatall.
    Em sé arrapats al coll els tentacles del pop.

    Sento l’udol del ca i el plany del llop.
    El galop desbocat de l’hora i el cavall
    del record que ens calciga, ja ni cassigall
    del que fórem, i el glaç que ens colga cóp a cóp.

    No sé sortir d’aquest carrer tallat
    a sang pel mur on les ombres m’endolen
    i on estrafaig només ganyotes de penjat.

    I on et veig, cec als dies que s’escolen
    sense donar-nos treva, en el tauler marcat
    de la Mort, que ens ha fet escac i mat.


    Lourd comme du marbre, un sac plein de Dieu.
    SYLVIA PLATH

    La mort t’a fait irrémédiablement échec et mat
    et me revient par ricochet, du fond du miroir
    m’y maintenant captive : je ne vais pas me le cacher.
    Je sens les tentacules de la pieuvre s’accrocher à mon cou

    J’entends le hurlement du chien et la plainte du loup.
    Le galop effréné de l’heure et le cheval du souvenir
    qui piétine déjà, les haillons de ce que nous étions,
    et la glace qui nous recouvre copeau après copeau.

    Je ne sais comment sortir de cette rue entaillée jusqu’au sang
    par le mur dont les ombres me blessent
    et où je ne fais qu’imiter les grimaces du pendu.

    Et où je te vois, aveugle aux jours qui s’écoulent
    sans nous laisser de répit, sur le plateau marqueté
    de la Mort, qui nous a fait échec et mat.

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    A propos de Desglaç

    Desglaç est le cinquième recueil de poésies de Maria-Mercè MARÇAL.

    Il fut publié en 1988 à Barcelone par la maison d’éditions « Edicions 62 – Empúries ».

    Il compile 83 poèmes écrits entre 1984 et 1988 ainsi que des dédicaces et des citations.

    C’est un recueil charnière dans la vie et l’œuvre de Maria-Mercè MARÇAL. En effet, il s’ouvre sur la période qui fait suite à la mort de son père et du contrôle qu’il exerçait sur sa vie. Même décédé, il est toujours présent dans ses pensées comme un épervier qui l’observerait et la jugerait (jeu de mot en catalan entre le pare, le père, et l’esparever, l’épervier).

    Après une première partie où l’auteur tente d’apprivoiser la douleur de la perte, la deuxième partie va être celle de la conjuration progressive de l’emprise de la figure paternelle sur sa vie et ses amours.

    La troisième partie va être celle de la libération, du dégel (desglaç) et de l’ouverture aux amours précédemment interdits ou refoulés.

    Catégorie : Non classé | Commentaires fermés sur A propos de Desglaç

    Pour toi je reviens…

    Per tu retorno d’un exili vell
    com si tornés d’enlloc. I alhora et sé
    terra natal, antiga claror meva,
    i l’indret on la culpa es feia carn.

    Retorno en tu, per tu, a l’espai cec
    d’on vaig fugir sense poder oblidar;
    desig sense remei, ferida arrel
    arrapada, clavada cos endins.

    Per tu retorno d’un exili vell,
    refugi contra tu, des d’on trair
    la primera abraçada i on triar,
    des de l’enyor, l’escanyall d’unes mans.


    Retorno a tu, per tu, al vell jutjat
    sense horari ni nom, fosa en la pell
    dels teus camins que em coneixen la pell,
    closa en els ulls que ja gosen fitar
    el teu esguard, com si tornés d’enlloc.


    Pour toi je reviens d’un ancien exil
    Comme de retour de nulle part.
    Et à la fois, je te connais
    terre natale, mon ancienne clarté
    et l’endroit où la faute se fit chair.

    Je retourne en toi, pour toi, à l’angle mort
    d’où j’ai fui sans pouvoir oublier ;
    désir sans remède, racine agrippée,
    Clouée à l’intérieur.

    Pour toi je reviens d’un lointain exil,
    refugié contre toi, d’où trahir
    la première étreinte et d’où choisir
    par nostalgie, le collet de tes mains.

    Je retourne en toi, pour toi, à l’ancien tribunal
    sans programme ni nom, fondu dans la peau
    de tes sentiers qui connaissent la mienne,
    Refermé sur mes yeux qui osent déjà soutenir
    ton regard, comme de retour de nulle part.

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    Je ne suis qu’absence de toi…

    Sóc sols absència
    de tu, fantasma lívid
    que te’m dessagnes
    entre les mans de l’ombra
    – les meves mans exsangües.

    Ombra sense ombra
    que et repeteixi els passos:
    només jo, dòcil
    gos fidel, ressegueixo
    l’empremta ja esborrada.


    Je ne suis qu’absence
    de toi, fantôme livide
    que tu saignes
    entre les mains de l’ombre
    – mes mains exsangues.

    Ombre sans ombre
    qui marche dans tes pas
    juste moi, docile
    chien fidèle, je reprends
    la piste déjà effacée.

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    Les poèmes traduits

    Je ne suis qu’absence…
    Pour toi je reviens
    Daddy
    Parfois la glace
    Maternité
    N’étrangle pas la petite….
    Chansonnette douce
    Dans l’espace sombre…
    Sur une peinture de ….
    La mort t’a fait les pieds de glace
    Le ciel s’est peint le visage
    Sous ce vent s’attisent….
    Ombre rapace
    Fin’amour
    Père épervier
    Cette part de moi…
    La mort t’a fait échec et mat
    Quand au milieu du dégel
    Trouble est mon amour pour toi
    Tu t’en vas vers l’horizon de ton plaisir
    Comme deux étoiles jumelles
    Vaincues, non. Dépossédées
    Ma soif est un miroir obscur
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    Biographie de MMM

    Maria-Merçè MARÇAL I SERRA est née le 13 novembre 1952 à Barcelone mais c’est Ivars d’Urgell, où elle a passé son enfance, qu’elle considérait comme sa ville natale.

    Grâce à une bourse, elle quitte son village pour aller étudier au lycée de Lleida où elle découvre la littérature et adopte le catalan comme langue littéraire.

    En 1969, elle s’installe avec sa sœur Magda à Barcelone où elle étudie à l’université et est diplômée en philologie classique. C’est à cette époque qu’elle entre en contact avec de jeunes poètes tels que Miquel Desclot, Jaume Medina et Ramon Pinyol qu’elle épousera en 1972.

    À partir des années 1970, elle est active dans l’antifranquisme et fonde avec d’autres la maison d’édition Llibres del Mall, d’où émergera une nouvelle génération de poètes catalans.

    Puis, elle est nommée professeur de langue et de littérature catalane dans un lycée de Barcelone. C’est à cette époque qu’elle s’implique ardemment dans les mouvements féministes.

    Elle se fait connaître en 1977 avec la publication du recueil de poèmes Cau de Llunes, une œuvre qui remporte le prix de poésie Carles Riba.

    En 1979, elle publie Bruixa de dol, qui devient l’un des livres les plus vendus de poésie catalane des 15 dernières années.

    En 1980, elle donne naissance à sa fille unique, Heura, une expérience qu’elle développe poétiquement dans Sal oberta (1982) et dans la seconde partie de La germana, l’estrangera (1985). En 1984, elle rencontre Fina Birulés, penseuse et professeur universitaire de philosophie, qui sera sa compagne jusqu’à sa mort.

    Ses nombreux poèmes ont été rassemblés dans deux anthologies, Llengua abolida en1989, qui rassemble sa production poétique de 1973 à 1988, et Desglaç, en 1998.

    Beaucoup de ses poèmes ont été repris en chansons par des auteurs-compositeurs-interprètes catalans tels que Maria del Mar Bonet, Marina Rossell, Ramon Muntaner, Celdoni Fonoll, Teresa Rebull et Sylvia Perez Cruz.

    Avec son premier et unique roman, La passió segons Renée Vivien, elle obtient en 1994 le 1er prix Carlemagny du roman, le prix Institució de les Lletres Catalanes et le prix Prudenci Bertrana, et se fait connaître en dehors des cercles poétiques.

    Elle s’est également consacrée à la traduction d’écrivains féminins tels que Colette, Margaret Yourcenar, Leonor Fini, Anna Akhmàtova et Marina Tsvetàieva.

    Au cours des dernières années de sa carrière, elle a également promu la création du Comité des écrivains, au sein du Centre catalan du PEN Club, dans le but de récupérer l’œuvre littéraire féminine et de promouvoir la visibilité et l’interrelation des écrivaines actuelles.

    Après quelques années de lutte contre la maladie, durant lesquelles elle écrit une grande partie du recueil posthume Raó del cos (2000), elle décède le 5 juillet 1998 à Barcelone, des suites d’un cancer. Après les funérailles à Barcelone, elle est enterrée dans sa terre de cœur à Ivars d’Urgell.

    Bibliographie :

    1. Cau de llunes. Barcelona: Aymá, S.A., 1977. Poesía.
    2. Bruixa de dol. Barcelona: Mall S.A., Edicions del, 1979. Poesía.
    3. Sal oberta. Barcelona: Mall S.A., Edicions del, 1982. Poesía.
    4. Terra de Mai. Barcelona: Mall S.A., Edicions del, 1982. Poesía.
    5. La germana, l’estrangera. Barcelona: Mall S.A., Edicions del, 1985. Poesía.
    6. La disputa de fra Anselm amb l’ase ronyós de la cu. Barcelona: Aliorna, S.A. Editorial, 1986
    7. Llengua abolida (1973-1988). Valencia: 3 i 4. Eliseu Climent, Editor, 1989. Poesía.
    8. Viratges, reminiscències. Dins de Barceldones, 1990
    9. La passió segons Renée Vivien. Barcelona: Columna Edicions, 1994. Novela.
    10. Desglaç (1984-1988). Barcelona: Península. Edicions 62, 1997. Poesía.
    11. El senyal de la pèrdua:Escrits inèdits dels últims anys. Barcelona: Empúries, 2014. Miscelánea.
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    Préface de Fina LLORCA

    Par Fina Llorca

    Article extrait de Visat.cat
    avril 2008

    C'est un recueil dense, avec trois parties différentes. L'image du dégel, la récupération de la fluidité de l'eau qui, déjà dans les poèmes précédents de Marçal, représente le féminin par excellence, symbolise le retour à la vie et au sens. Le dégel peut survenir une fois que la mort du père a été surmontée ou, plutôt, après la mort de la "loi du père", qui est responsable de cette pétrification.
    
    La première partie fait référence à un poème de Sylvia Plath, « Daddy », recueilli dans Ariel (1961), qui est le titre du long poème que la poétesse anglaise a dédié à son père dans lequel elle le voyait comme un fasciste et elle-même comme une juive ; l'homme était un «sac plein de Dieu», un vampire dans le cœur duquel la fille parvient, dans les derniers vers, à clouer le pieu et enfin à le libérer et peut-être à s'en libérer.
    
    Le "Daddy" marçalien est, d'autre part, une réflexion sur le système patriarcal que la notion de Père peut incarner, mais en même temps c'est une complainte, pour la mort du père réel, Antoni, décédé peu de temps auparavant et à qui elle a dédicacé Llengua abolida. Le lieu où se situe la voix poétique est celui de la fille pas tout à fait obéissante au Père et à sa Loi, qui témoigne de l'appropriation patriarcale de la voix féminine et lui répond par la parole dont elle a été dépouillée. Marçal exhorte son père à ne pas endosser des rôles de pouvoir et propose l'utopie de "deux étoiles jumelles" la nuit, quand miracles et transformations sont possibles, deux étoiles brillantes pour dépasser la dichotomie symbolique entre le Soleil et la Lune. Le "Daddy" de Marçal se termine par une berceuse émouvante, dans laquelle les rôles s’inversent : le père peut être le fils et en même temps la mère ; la fille, la mère. C'est seulement ainsi que le père peut être distingué du Père. Seul ce Père symbolique, assimilé poétiquement à l'image pétrifiante de l'épervier, doit serrer les dents devant la dure parole de la fille. L'échec et mat de la mort, image du premier poème, doit permettre ce renouveau, ce commencement, comme le dégel annonce le printemps.
    
    Parmi les poèmes de «Daddy», il y en a deux où se manifeste pour la première fois le coté fémininiste de la poétesse démissionnaire de la parole sacrée. Pour écrire le premier de ces poèmes, le « Père-Épervier », Marçal aurait pu lire « A propos du Pater », note sur le « Notre Père » de Simone Weil, mais la sienne n'est pas, contrairement à celle de Weil, une prière au Dieu fait homme qui ignore l’être féminin sur Terre. L'épervier marçalien est une affirmation de l'étrangeté féminine à propos d'une religion qui ne s'est jamais incarnée dans le corps d'une femme. C'est une énonciation poétique faite du corps, du sang, aussi quotidien pour les femmes que le pain de tous les jours, un sang qui « coule au-delà de vous dans le présent », inaperçu jour après jour aux yeux de Dieu. C'est précisément le sang, langage du corps, qui est la seule voix de la fille sans voix, sans mot, la voix du silence qui crie dans un monde et devant un dieu qui l'a spoliée.
    
    Le second, "Père, pourquoi ne m'abandonnes-tu pas", est une reformulation de la quatrième parole de Jésus agonisant sur la croix. Le douloureux reproche du Fils fait homme dans les Évangiles devient ici la demande déterminée de la fille qui ressent l'absence du père comme une présence envahissante et sans limite, qui l'oblige à une éternelle recherche obsessionnelle et stérile autour de lui.
    Un troisième poème, « J'ai une tête d'homme dans ma tête », inspiré d'un des portraits de Frida Kahlo, est une réflexion sur la formation intellectuelle féminine dans un monde patriarcal ; au final, une impasse. L'homme enfermé dans le front du moi poétique, comme dans le front de Frida la tête de Diego de Rivera, est ici, comme chez Sylvia Plath, un sac plein de Dieu, ou Dieu lui-même, celui qui a l'œil clairvoyant que , comme Marçal l'a élaboré dans Raó del cos, est un œil autoritaire et, paradoxalement, aveugle.
    
    La deuxième partie, "Ombre de proie", plus hétérogène, est en quelque sorte le côté sombre des poèmes, qui brillaient dans la précédente section. Ici, au contraire, plane la présence de la mort et à nouveau l'œil de l’épervier ; la glace, la douleur, la guerre et la culpabilité. Il y a cependant une déclaration de confiance dans le pouvoir des mots : «Au milieu des murs d’écume, de ferraille », qui se réaffirme encore dans « N'étrangle pas la petite qui vit, rebelle, en moi », dès la troisième partie. Une autre réflexion sur la maternité avec un poème du même titre, part également d'un vers de Sylvia Plath, « jusque-là vos sourires étaient de l’argent trouvé », que Marçal contredit comme elle l'a fait avec tant de vers d'autres poètes : «Dés le début, ton rire n'a pas été une monnaie facile».
    
    La troisième partie, « Contraban de llum », qui contient le plus de poèmes, est une tentative de redéfinition de l'amour qui est passion amoureuse ; mais c'est en même temps un pacte, un compromis  primordial, de la place féminine et des marges occupées, dans la symbolique dominante, par l'amour homosexuel. Les coutumes de l'amour exigent un prix élevé pour eb franchir les frontières, mais les bagages de contrebande ne sont ni plus ni moins que lumière. Ce recueil de poèmes part en quelque sorte de l'avant-dernier poème du précédent recueil de poèmes, Sal Oberta, où la voix poétique demandait d'autres regards, d'autres mots, de nouveaux chemins. Maintenant, elle revendique "un autre nom pour l'amour". On pourrait dire que Desglaç est l'œuvre pour trouver, ou plutôt pour resignifier, le nom de l'amour. C'est un travail exigeant dans la pensée et l'expression, avec des créations insolites et éclairantes, comme la remise en question du mythe de la complémentarité entre les sexes, désormais vue à partir de l'altérité du féminin amoureux contenue dans «Si toi et moi nous nous additionnons, pièce par pièce ».
    
    La veine populaire inspire une fois de plus "El meu amor sene casa" où, à travers la structure des phrases qui se répètent et s'allongent et d'images inédites troublantes, la voix poétique semble scander une complainte exilée : l'amour hors des normes n'a pas de place pour vivre, pas d'espace social pour se symboliser.
    Dans Desglaç, les versets de la tradition sont à nouveau convoqués et contredits. Le premier poème est construit à la manière des couplets d'Ausiàs March, mais il y a aussi l'écho des vers de Vinyoli, de Dickinson, de l'admirée Renée Vivien et une résonnance de Clarice Lispector.
    
    Avec ce recueil de poésie, Maria-Mercè, comme elle l'écrit dans les mots qui précèdent Llengua abolida, considérait qu’un cycle poétique était refermé. En effet, commence alors une période de réflexion dans l'œuvre de Marçal, dont l'écriture va se cristalliser dans le roman, La passion selon Renée Vivien. Cela ne veut pas dire qu'elle n'a pas continué à écrire des poèmes ; dans le recueil posthume Raó del cos, nous pouvons en lire quelques-unes qui récupèrent l'empreinte effacée des femmes dans l'histoire, et aussi dans l'histoire sacrée. Sa maladie et sa propre mort se lisent transmutées en passion féminine jamais signifiée au monde dans quelques poèmes qui s'adressent à une Mère divine, proscrite et supplantée par le Dieu mâle qui, selon Marçal, ne cesse de veiller d'un oeil glacé. La poète fait ici référence à l'œuvre d'Akhmatova et à la tradition des penseurs religieux du Moyen Âge à Simone Weil, en phase avec la pensée de la contemporaine Luisa Muraro.
    
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    Pourquoi une traduction de Desglaç ?

    Pour contribuer à faire découvrir une des plus grandes poétesse catalane du XXème siècle.

    En souvenir de celle qui me fit découvrir son oeuvre et qui changea ma vie pour toujours.

    En hommage à ma grand mère qui me lisait de la littérature et de la poésie catalane.

    Pour me prouver que je n’ai pas tout oublié de ma langue de coeur….

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    Je publierai régulièrement les traductions des poèmes à raison de deux ou trois par semaine et pas forcément dans l’ordre du recueil.

    Alors un peu de patience…

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    Pour recevoir un mail à chaque nouvelle traduction d’un poème :

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