Et bonjour les amis !
J’me présente, j’m’appelle Roger le rouge-queue mais mes parents me surnomment « l’aventurier »…
Ça vous surprend quand vous voyez ma petite bouille, non ? Attendez un peu, vous allez comprendre…
Mais, avant de vous raconter mon histoire, je vais d’abord vous présenter mes vieux…
Voici l’paternel, toujours très smart avec sa livrée noire et sa queue de pie rousse. Il porte sur la tête, une calotte noire grisâtre. Son front et sa face sont noirs. Ah, c’est sûr, on le remarque mon papa…
Maman, quand à elle, préfère les couleurs plus discrètes avec un plumage uniforme gris-brun cendré. Sa poitrine grisâtre est légèrement striée de foncé.
Mais sa tenue lui permet de passer partout, dans les buissons, les branches d’arbres ou au sol. Ah, c’est sûr, maman, elle sait s’adapter à tous les milieux…
Il faut dire que malgré notre apparente fragilité, nous sommes des passereaux très robustes !
Et puis, on est costauds car on mange plein de bonnes choses très énergétiques… C’est surtout de petits invertébrés tels que sauterelles, punaises, lépidoptères, mouches, fourmis, abeilles, guêpes, scarabées, araignées, petits mollusques et vers de terre.
Sans parler des chenilles, mes préférées, miam, miam…. On consomme aussi des graines, des fruits et des baies, surtout à l’automne.
Vous pouvez voir le tableau de chasse de mes vieux ci-dessous (et cliquer du bec sur une des photos pour les voir mieux…).
Et puis on est résistants car ma famille est originaire de la montagne, jusqu’à 2 500 m d’altitude, où elle vivait dans les roches et les éboulis.
C’est pourquoi, on aime bien s’installer dans des milieux qui nous rappellent nos origines, comme dans des trous, des cavités, des crevasses, derrière les gouttières et dans l’encadrement des fenêtres.
Actuellement, mes vieux crèchent en colocation avec des humains; on occupe le haut de la maison, juste en dessous du toit à gauche et eux vivent plus bas, sur la terrasse.
Ils sont pas trop pénibles ces humains, à part peut être le barbu qui passe son temps à nous photographier; il doit s’embêter…D’un autre coté, on est tellement beaux que je le comprends…
Papa et maman sont des habitués de cette turne : chaque année, ils y reviennent même s’ils refont le nid à chaque fois. Voici d’ailleurs une vue de notre balcon avancé :
Maman y dépose généralement de 4 à 6 œufs d’environ 20 mm de long. Ils sont brillants et blancs, parfois parsemés de taches brun-rouille. L’incubation dure environ 13 jours et c’est maman qui se tape tout le boulot de couvaison…Bon, papa lui amène à manger quand même…
Moi, je suis né à la mi-mai. J’étais aveugle et tout nu, juste revêtu d’un léger duvet gris-bleu, épars sur le dos.
Durant les jours qui ont suivi, mes vieux se sont relayés sans cesse pour nous nourrir mes frangins et moi. Faut dire qu’on a toujours faim à nos ages…
Et puis, c’est un peu un concours avec mes frangins : c’est celui qui ouvre le plus le bec qui a le plus de chance d’avoir les bonnes choses…A ce p’tit jeu, je gagnais souvent….D’ailleurs, papa dit que je suis vraiment une grande gueule ! Ça doit être un compliment….
Et puis, au bout de quelques jours, j’ai commencé à y voir. Je me suis rendu compte que mes vieux arrivaient toujours du même endroit, vers le coté d’où vient la lumière.
Alors, je me suis dit que si je m’avançait par là, je pouvais peut être les intercepter dés qu’ils arrivent et ainsi, manger plus de bonnes choses, sans avoir à partager avec mes idiots de frangins….
Et ça a marché ! J’ai même eu droit à une chenille verte qui m’a rempli le gosier….Et puis, j’ai pu admirer de près une démonstration de vol rapproché de papa, ça déménage….
Quand j’serais grand, je volerai aussi bien que lui…
Au fur et à mesure des jours, j’ai passé de plus en plus de temps sur ce rebord de toit, à attendre mes vieux mais aussi à observer le monde….
Maman n’arrêtait pas de me dire de faire attention, de ne pas me pencher et qu’il était encore trop tôt pour faire le « Grand Saut »…J’ai pas vraiment compris de quoi elle parlait…De toutes façons, les vieux, c’est toujours inquiets ou à vous faire des tas de recommandations inutiles…
Et puis, c’est arrivé….
Le 15ème jour après ma naissance, alors que je contemplais le ciel, une espèce de gros insecte appétissant est venu voleter près de moi. J’ai tendu le cou pour essayer de l’attraper et j’ai glissé….
Hou la la ! J’ai compris ce que maman voulait dire par « Le Grand Saut ». J’ai bien essayé d’ouvrir mes p’tites ailes mais ça n’a pas servi à grand chose….
Et boum !!! Ah, mes amis, l’atterrissage fut vraiment rude…J’étais tout estabousi, comme disent mes cousins du sud…
Au bout de quelques instants,j’ai repris mes esprits et j’ai commencé à regarder autour de moi; la lumière était très forte et me faisait mal aux yeux. J’étais posé sur des espèces de tiges vertes moins confortables que le nid que maman nettoyait tous les jours. Et puis, il ne faisait pas très chaud comme sous le toit.
Et il y avait plein de bruits bizarres tout autour de moi…Je dirais pas que j’ai eu peur (j’suis pas une mauviette…!) mais quand même…
Puis, j’ai levé les yeux et j’ai aperçu maman qui arrivait vers moi. Ouf, elle allait m’aider à rentrer à la maison…
« – Roger, je t’avais prévenu de ne pas te pencher ! Tu as fait « Le Grand Saut » un peu trop tôt. Ah, tu peux dire que tu m’en aura fait des plumes blanches….Mais bon, ce qui est fait est fait…
Maintenant, écoute moi bien cette fois-ci, car ta survie en dépend…Ce qui t’es arrivé est normal chez nous les rouges-queue. Tous nos petits doivent quitter le nid alors qu’ils ne savent pas encore voler ! Tu devras vivre au sol durant une quinzaine de jours environ, jusqu’à ce que tu saches bien voler.
D’ici là, tu dois te cacher dans les fourrés, les buissons, les tas de bois car, je te préviens Roger, il y a des tas de prédateurs qui essayerons de te croquer…
Et certains qui trainent dans le quartier, sont vraiment féroces…
– Euh, même pas peur d’abord…Répondis-je d’une voix que j’aurai aimé plus assurée….
– Oui et bien tu vas m’écouter pour une fois et commencer à te dissimuler derrière des herbes ou des buissons. Tu vas essayer de ne pas faire trop de bruit afin que les prédateurs ne t’entendent pas. Quand je viendrai te voir, je ferai un signal et tu pourras me répondre à ce moment là. Tu as compris ?
– Oui maman. Mais comment je vais faire pour manger ?
– Et bien tu vas apprendre à attraper des petits insectes par toi même…Et puis, je continuerai à t’amener des choses à manger pour que tu ais assez de forces pour chasser.
– Même des chenilles vertes, dis maman?
– Oui, surtout des chenilles vertes mon grand…. ».
Comme maman s’envolait, je regardais autour de moi et trouvais quelques herbes pour me dissimuler. Mais j’avais grand faim et j’espérais que maman n’allait pas trop tarder….
A ce moment là, je l’entendis faire son claquement caractéristique : « Tia, tia, tia ». Je m’empressai de lui répondre et d’ouvrir grand mon bec….
Après cette collation (une chenille verte, merci maman…), la lumière commença à décliner et la nuit s’installa.
Il y avait des tas de bruits étranges et inquiétants….Et en plus, un orage incroyable s’abattit sur mon buisson…. En un rien de temps, j’étais complétement trempé et frigorifié….
Quand je pense à mes frères et sœurs qui sont la haut, bien au chaud dans le nid….Bah, de toutes façons, c’est des trouillards et des bébés…! Mais bon, j’échangerai bien ma part de chenille contre une place à l’abri…..
La nuit fut interminable mais le lendemain matin, malgré le fait que j’étais tout mouillé, j’étais en vie !
Je profitais de la lumière pour découvrir un peu les environs autour de mon buisson et tenter de trouver un endroit plus à l’abri de la pluie…
Durant la matinée, j’attrapais mon premier insecte, une mouche…C’est moins bon et moins consistant que la chenille verte mais je l’ai eu tout seul, comme un grand….
En fin d’après midi, j’eus très peur….En effet, la bête sanguinaire que maman m’avais décrit rodait et elle reniflait juste en dessous de ma cachette ….
Je me faisais tout petit, me préparant à lui donner un coup de bec dans l’œil, histoire de vendre chèrement ma peau, non mais ! Je l’entendis s’approcher lentement et écarter les herbes avec son horrible patte griffue….
A ce moment là, alors que je ne donnais pas cher de mes petits os, j’entendis des froissements d’ailes et des claquements de becs stridents ! Et là, je vis mon paternel qui volait au dessus du monstre et qui lui donnait des coups de becs rageurs et lui assénait des insultes bien senties en rouge queue….
Surpris par l’attaque, ce froussard s’enfuit sans demander son reste….
Mon papa, c’est le plus fort du monde….!!!
Après cette alerte, je devins un peu plus prudent….Surtout qu’on ne sait jamais avec cette sale bête…Mais mon papa est toujours à proximité, posé sur un poteau ou une branche et il veille attentivement sur moi.
Les jours suivants, j’améliorais mes petits bons et j’appris à commencer à me servir de mes ailes pour voleter un peu.
Je réussis également à attraper de nouveaux insectes mais maman continuait inlassablement à m’amener des bonnes choses et parfois des chenilles vertes….
———————————————
Cela fait maintenant 8 jours que j’ai fait « le Grand Saut » et j’ai élu domicile dans un tas de bois, bien à l’abri. De plus, il y a plein d’insectes savoureux dans ce coin et même des chenilles que j’arrive à attraper tout seul, comme un grand !
Mes parents viennent moins souvent me nourrir et d’ailleurs, aujourd’hui, je les ai vu se voleter autour et se chercher….M’est avis que j’vais pas tarder à avoir à nouveau, des petits frères et des petites sœurs….
En attendant, je contemple mon territoire au petit matin et, très bientôt , je vais enfin pouvoir me servir à plein de mes ailes et partir explorer le ciel.
Et là, j’serais le kador du coin; et même le chat aura peur de moi !
Enfin, si je survis d’ici là…
Liens et remerçiements :
Rappel : Le rouge queue noir bénéficie d’une protection totale sur le territoire français depuis l’arrêté ministériel du 17 avril 1981 relatif aux oiseaux protégés sur l’ensemble du territoire. Il est donc interdit de le détruire, le mutiler, le capturer ou l’enlever, de le perturber intentionnellement ou de le naturaliser, ainsi que de détruire ou enlever les œufs et les nids et de détruire, altérer ou dégrader leur milieu. Qu’il soit vivant ou mort, il est aussi interdit de le transporter, colporter, de l’utiliser, de le détenir, de le vendre ou de l’acheter.
La hulotte : et oui, on en revient toujours à La Hulotte dont je m’inspire modestement pour ces petites histoires éducatives
Fiche détaillée du rouge-queue noir sur Oiseaux.net
Fiche dans « Mon carnet de terrain » (en cours, un peu de patience….)
Infos générales sur Wikipedia
Plan de nichoir à Rouge-queue sur Nichoirs : pensez-y sérieusement, j’ai pu observer que les parents ramènent des insectes, en moyenne toutes les 2 minutes et cela du lever au coucher du soleil….Ce sont de sacrés auxiliaires pour les jardiniers, bien plus efficaces que tous les produits, même bio….
Bonjour , que je suis contente de lire votre beau reportage ! Nous venons de laisser s’envoler un jeune Rouge-queue de 20 jours environ après que nous l’ayons trouvé en mauvais état il y a 9 jours (son frère mort pas loin de lui) , il faisait de la canicule et les fourmis étaient déjà sur le survivant complètement déshydraté… qui en deux jours s’est remis et a commencé à grandir joliment . Quand le jeune est sorti seul de la cage sur la table de la terrasse ce matin , il s’est envolé rapidement et ma joie de voir un adulte le suivre et le rejoindre dans l’olivier , puis qq minutes plus tard , ils sont repartis à trois , donc ses deux parents SUPER !
J’espère qu’ils vont assurer , parce que pour l’instant il est près du tas de bois et il appelle … Vraiment merci pour votre beau récit , je me suis sentie en terre connue !
Bonjour, merci pour votre magnifique histoire! J’ai chercher sur internet « mon chat se fait embêter par un rouge queue » et je suis tombée sur votre histoire! Ce soir nous venons de voir le bébé sur un rebord de fenêtre et le papa est venu le chercher pour le remmener au nid. Ça fait deux semaine que notre chat se fait engueulé sur le balcon. On pense maintenant qu’elle sera tranquille 😉
Merci!
Florence
Merci !
Et si xes petites histoires inspirées de La Hulotte vous plaisent, vous pouvez consulter les autres dans La garzette; http://glacas.fr/blog/category/la-garzette/
c ‘est toujours un plaisir de lire tes reportage
Voilà une superbe histoire à partager avec mes petits CP ! Merci Florent pour ce cadeau de fin d’année
Merci Florent
Je garde précieusement ton mail pour lire cette histoire à ma petite fille Clarisse.
Pur moment de fraicheur !
Martine
Génial. Merci Florent, un vrai moment de bonheur. Et quels clichés !
Véronique, la voisine
Passionnant et émouvant vivement la suite!
Passionnant Florent
quel talent de conteur et bravo pour les photos!
Très chouette et instructif , on a eu le cousin de Roger qui a fait le grand saut depuis le toit de notre maison aussi !!
bravo, c’est ludique et très intéressant! à poursuivre avec d’autres oiseaux de nos jardins
Très sympa, nous aussi habitons chez les oiseaux 😉